vendredi 30 septembre 2011

ENTRE NOUS ( 10 ) : Les gens en Zone Rouge ou Hostile .


Introduction
Cette page paysanne " Entre nous " est plutôt personnelle . Envie de parler , et de discuter parfois , de tout ou de rien . Pour le plaisir de raconter aussi de petites histoires des humbles personnes , de ces connaissances de fortune , qui vivent dans les contrées réputées hostiles et dangereuses dit - on . Merci .
Commentaires : Sur la piste du Sud Tritriva , Région du vakinankaratra , et une case de Migrant . Notre paysan sur la photo était un ex-militaire qui a pris femme dans le village . Il s 'adonne au petit élevage ( canard , poule et les lapins aussi ) . Il exploite , avec des légumes et une rizière , un petit bas fond où une source permanente coule . Les paysans estiment bien sa présence en raison de ses compétences en matière de défense et d'organisation . Sa femme était aux champs pour sarcler leur jardin composé de petits pois et de carottes . " Est ce que la route est bonne ? " lui demandais - je ? " Oui ..bien sûr " répondit - il " Mais ne voyager pas tard dans la nuit ; des bandes de gens venus d 'ailleurs vont et viennent ici...et je ne les connais pas ces étrangers là " .


ZONE ROUGE

Les zones rouges , selon le jargon administratif , sont les arrières pays enclavés , isolés et sous administrés car la présence du pouvoir public est moindre . L ' insécurité dans son sens large est prépondérante ( sous peuplement avec 50 Habitants /Km2 , couverture sanitaire faible , analphabétisme de la population , acte de brigandage etc...) . Ces zones se localisent sur toute l ' étendu du Moyen Ouest et comprend ainsi la moitié de la surface de la grande île . J avais effectué une descente dans deux communes rurales situées à l ' extrême sud de la Région du vakinankaratra : Anosiarivo/Manapa et Andrembesoa . Et zones rouges ou non , une population paysanne appliquée , laborieuse et solidaire y vivent . Narration .

Commentaires : Traduction de l 'enseigne " Prothésiste dentaire et fabriquant de bijoux en or ". Le contrée est sillonné par des chercheurs d ' or douteux et des spéculateurs louches . Cette maison est sous louée par deux colporteurs et marchands ambulants . Tous deux , avec leur bicyclettes , font le tour des marchés hebdomadaires des communes rurales . L ' un fabrique des dentiers avec un attirail artisanal , et l 'autre prospecte ou achète de la poudre d 'or . Les deux activités se complètent parfois quand un client édenté désire des dents en or . Il fut un temps où , selon les paysans , la dentition en or était tellement à la mode que les riches éleveurs nomades ou bien les grands propriétaires terriens s'arrachaient volontairement leurs dents pourtant saines pour les remplacer par celles en or . La valeur et le prestige social de la personne se mesurait donc par son sourire en or ! Ailleurs les canons de valeurs et de l "esthétique seraient le port de vêtements portant la griffe prestigieuse des grandes maisons de coutures .
Commentaires : La mare aux canards du militaire migrant . Il m 'expliqua qu 'il désirait élever des poissons dans ce plan d 'eau . " Je ne sais pas si c 'est possible " lui rétorquais - je " car tes canards , il faut déjà les mettre dans un enclos car ils vont manger les petits poissons " . Il m ' offrit des oranges de son verger . Je lui ai promis d envoyer des documents sur la pisciculture .

Conclusion
Le moyen Ouest est certainement l 'avenir des populations de Madagascar , tant c 'est immense , et plus ou moins fertile . Tout cela me rappelle cette histoire d 'enfant qui raturait avec une attention soutenue , une feuille de cahier . " Hé gamin , qu'est ce que tu fais là ? ". " Je fais un village.. là ce sont mes copains , ici c 'est mon chat...et là bas , c 'est le mauvais garçon qui me vole tout le temps mon goûter en classe " . C 'est vrai , le bien et le mal coexistent sur notre terre , et même dans le monde imaginaire et innocent de l ' enfance .

mardi 6 septembre 2011

FONCIER N ° 26 : Terre du peuple ou Tanim - Pokonolona

Introduction :
Notre Blogpaysans aura vécu 3 ( trois ) ans . J 'ai le plaisir de reprendre ici des anciennes chroniques de 2 009 car le Blog , fidèle à sa vocation de départ , narre , relate et analyse le vécu , le vu et le su tout en évitant de tenir un discours tendancieux ou politiquement vaseux . Notre Blog est toujours ouvert a une échange de vue pratique et à une partage d 'expertise , du moment que l ' objectif sert aux intérêts de la population des " sans voix " ( sauf que la paysannerie parle et livre actuellement leurs propres idées ) . Merci et bienvenue aux nouveaux membres du Blog .


Commentaire : Habitat d ' une Famille de migrant . Moyen Ouest . Belobaka , Région Melaky . L 'aspect modeste et précaire de la case en pisé , ou du parc à zébus conçu avec un enchevêtrement de bois et d ' épineux ( Droite Photo ) s ' interprètent de deux façons et selon le point de vue :
1 ) La pauvreté flagrante choque les uns et les pousse à s 'apitoyer et à " aider " ces migrants en faisant de l ' humanitaire par exemple . La compassion est humaine .
2 ) Mais la logique paysanne dans ce zone hostile a développé chez les humbles Migrants eux même le sens de la discrétion hospitalière et de la coexistence pacifique avec tout le Monde , y compris les bandits de grand chemin ( Malaso ) ou les gendarmes . L 'étalage des richesses et l ' ostentation ne seraient ici qu ' un appel au vol et au crime . C 'est du bon sens et non une histoire de pauvreté et d ' indigence exclusivement . C 'est la Logique de situation , selon les Sociologues .

Commentaire : Dessin sur Pousse pousse . " L allée des Baobab à Morondava " . L 'œuvre populaire conçu en peinture acrylique résiste bien aux intempéries . Un bon coup d ' éponge à passer sur ce tableau et les souillures de boue partiront et nous retrouverons de nouveau une flamboyante miniature décorant les pousse pousse .

Tanim - Pokonolona ou Terre du peuple

Commune rurale d ' Anosiarivo Manapa . La vallée de 3 000 Hectares de cette commune avait été " décrétée " oralement par les Migrants de Manapa : tanim - pokonolona en Février 2 011 . La propriété Foncier revient donc au Fokonolona , cette entité populaire de Base qui a une fonction délibérative en cas de litige . La notion rend perplexe les chercheurs et observateurs du Foncier car l ' entité Fokonolona , bien qu 'ayant une Historique socio - culturelle , peut - elle aussi s 'approprier le Foncier par voie de Kabary ( Discours délibératif populaire ) ?
les questions d ' ordre technique et juridique abondent et pleuvent en ce moment quant à ce cas sans précédent où la présomption de domanialité est bel et bien détournée (ou interprétée ) par les paysans eux même , et ce , dans leur propres intérêts mais en sens unique surtout : " Le pouvoir ici sur place c 'est NOUS , le Fokonolona . Le Pouvoir là bas en ville , c 'est eux l ' État et les politiques , opposants ou pas " .

Anecdote

Dernièrement,vers le mois de Juillet,une ruée sauvage vers une niche d'or eu lieu dans cette Commune.Le Maire m'interpella pour un autre sujet car la Commune cherchait aussi les moyens pour bâtir leur Lycée et pouvoir l'achever , impérativement ,avant les premières pluies d'Octobre de cette année 2011.Le Maire me communiqua alors que des prospecteurs affairés veulent collaborer avec sa commune pour l'orpaillage .Je lui répondit ainsi:"En principe,ces orpailleurs doivent avoir leur permis et qu'en principe,les 35% des ristournes de l'or exploité doivent reviennent dans la caisse communale . En principe(raha tokony ho izy)" .Le Maire , rusé comme il se doit , de conclure avec un fin sourire à mon endroit:" Donc , en principe(sic)nous pourrions avoir l'argent pour notre Lycée villageoise ? C 'est bien ça ( Tsara zany )".
Dans cette même période de fièvre de l'or ,un exploitant minier me contacta alors sur cette question de ristournes ( je suis le conseiller spécial de la Commune )."C'est la Loi écrite"lui spécifie -je.Mais la situation confuse qui prévaut actuellement dans le pays n'incite pas tellement certains énergumènes au légalisme et aux respects des lois en vigueur.En plus en Brousse !.L'exploitant, inquiet pour d 'autres raisons sans doute , abandonna ses prétentions spéculatives ayant bien sûr des dessous louches.L'or serait,dit-on dans cette Vallée de Manapa,et cette vallée est désormais un
Tanim - pokonolona.Avis ou avertissement aux petits aventuriers et aux JIO ( Les mauvais ou sans scrupules en Malgache).

NB : J 'ai saisi les Collègues chercheurs de l ' Observatoire Foncier dans la Capitale sur cette notion de Tanim - pokonolona . Ils ont du recul et de l 'expérience pour appréhender cet aspect équivoque ( Socio juridique ) d 'appropriation verbale et populaire du Foncier . Merci à l ' Équipe de l ' OF . Anosy .

Commentaires : Dessin sur un manège abandonné . Un Cow Boy ( kaofy bouay ) . Les valeurs ( ? ) Western véhiculées par les Films outre Atlantique sont encore bien ancrées dans l ' imaginaire ici : Exhalation de l 'aventure échevelée et ivresse de grandes espaces ; bandit généreux et sauveur des faibles ou voleurs de riches ; approche manichéenne du mauvais indien ( indigène ? ) et du bon civilisateur armé de son colt légendaire . L ' Anthropologie des civilisations guerrières et Choc de ces civilisations ? Madagascar semble peut être , je dis bien peut être , offrir à toutes les tendances , cet espace d 'épanchement pour leurs lubies , pour leurs fantasmes ou pour leur idéalisme pour être gentil et " sympa " . Mais ...mais la vie n 'est pas du cinéma .

Commentaires : Cimetière des chevaux de manège . Ce manège ne fonctionne plus et reste abandonné dans un réduit / Poulailler car les enfants du propriétaire qui était un célèbre animateur forain , ont choisi d 'autres vocations plus commerciales et lucratives ( épicerie , élevage de poules pondeuses ...)

Avertissement


Reprise d ' un des premiers articles sur le problème Foncier à Madagascar .


25 Juin 2009


FONCIER 6 : 13 Mai des Paysans

Commune Rurale de Vasiana


Vasiana (Étoile) est une immense zone destinée au départ à être une Zone d'aménagement Foncier ( ZAF). C'est à dire un lieu, d'après notre ancienne politique Agricole d'avant les années 2000, destiné à être repeuplé par la migration Paysanne. Et s'y côtoyent, plus ou moins pacifiquement, et les paysans sédentaires et les Bouviers nomades dont des grands chefs de clan Bara ou Antandroy possèdent des milliers de zébus.
A Vasiana, un grand chef détient à lui tout seul 7000 têtes de bêtes. Nous irons là-bas, un jour, si vous voulez bien.
La question était de comprendre pourquoi des paysans et paysannes de là bas avaient fait aussi et enfin, leur 13 Mai ? Et bien sûr, à la grande consternation des grévistes de la ville et des observateurs politiques. Qu'est ce qu'on leur avait fait subir à nos paysans d'habitude si silencieux et tellement fatalistes ? (izany ro anjara raolona, c'est notre destin brave gens) ? Pourquoi le ciel et le terre devinrent subitement tumultueux (nikorontana tampoka ré ny tanin'aman'danitra) ?
Il est à Beakanga ( là où pullulent des pintades ), une grande vallée fluviale de quelques milliers d'hectares. Cette vallée ou lohasaha était la zone de pâturages traditionnels de bouviers. Les migrants eux même (mpifindra monina), avant leur implantation dans le site, doivent faire des négociations avec les premiers occupants Bara ou Antandroy (manao fomba fomba) . La co-existence entre les migrants sédentaires et Nomades n'était pas toujours facile quand, par exemple , les milliers de zébus déferlent dans les vallées et broutent tout en saccageant les cultures de manioc et maïs des paysans (manao tondrak'omby ny Bara lahy) .
Les litiges et les frictions sont légion, bref, c'est la politique de la ZAF en violente contradiction avec celle de la ZIA . Et des cas de conflits sont devenus par la suite des cas de jurisprudence. Dans les jugements et verdicts apportés, ce sont toujours les nomades et leurs bêtes qui étaient criminalisés pour cause de "divagation de zébus et destructions de cultures".
Notre Comité des Paysans suit de près ces chocs de cultures et de coutumes : vieux conflit de l ' Humanité , le sédentarisme et le nomadisme . La conquête belliqueuse de l'espace de vie entre le bouvier contre le cultivateur.
Puis , avec la nouvelle politique agricole de 2005 (date-clé du grand chambardement actuel ) , la vallée suscitée avait été privatisée , plus exactement , elle était devenue l'objet d' un Projet d ' exploitation par des privés et des opérateurs agricoles occupèrent les espaces pour faire de l ' agro bizness (cultures intensives de riz etc..)... Un développement rapide selon le jargon en fonction .
Les paysans m'avaient déja signalé à l'époque la présence d'indiens (c'était en fait des turcs qui revendaient des tracteurs de marque Renault aux opérateurs Malgaches).
Le nœud de cette grande et délicate affaire était que cette vallée des pintades était auparavant destinée aux Migrants sans terre et aux pâturages des zébus ( Projet de Zone d'aménagement Foncière ou ZAF). Mais le projet de Zone Industrielle Agricole ou ZIA a été parachuté de la ville et expulsa ainsi toutes les populations sus citées en mettant fin, sans préavis, à leur implantation et à leur projet d'avenir.
Bref, c'était la ZAF en contradiction flagrante avec la ZIA... Gueguerre de sigles qui masque, d ' une façon absurde et maladroite une politique agricole exclusive, agressive, et improductive en plus .
la ZIA a été ainsi (est ?) perçue par nos petits paysans et nos simples bouviers comme une véritable menace contre leur mode de vie . une mise à mort de leur si fragile civilisation pourtant centenaire , pour ne pas dire séculière .
Les opérateurs agricoles déjà eurent , au premier abord , de ces comportements équivoques en voyant les rustiques villages et les bouviers sérieusement affolés par ce branle bas technique (autorités en tenue safari, 4/4 rutilants , camions chargés d'engrais chimiques et de carburants , tracteurs turcs transportés sur des plateaux de camion etc...) .
Pour le programme du ZIA par exemple , une production de 5 Tonnes de riz/ha avait été prévue sur leur papier/Projet. Mais il n'y eu que 4oo Kg /Ha malgré leurs gros moyens mis en jeu... les potins villageois racontaient que nos opérateurs emmenaient même avec eux leur eau en bouteille plastique ( na ny rano sotrony anie dia ireny rano anaty tavohangy ireny é ! )
La raison ce cette incompétence technique et de cette sous-production devenue l'objet de risée des villageois ? " ben.. ce ne sont pas de véritables paysans mais de simples opérateurs agricoles" . C'est tout. Les paysans sur place , hilares , commencèrent alors , avec les bouviers , à rire sous cape des maladresses de ces drôles citadins tout en se moquant de la ridicule débauche de gros moyens de productions . " Ils ne savaient même pas que la saison des semis était finie.... c'est incroyable ! " ( loza izany marina )
Enfin , les évènements de Janvier 2009 avaient été l'occasion inespérée , historique même pour eux , de monter dans la Capitale , et d'exiger publiquement , durant les grèves que " l ' État Malgache leur restitue et redonne aux migrants et aux bouviers la vallée de Beakanga , cette vallée des Pintades destinée au départ pour le pâturage des zébus et pour la culture de leur riz, de leur manioc et de leur voanjo bory ou pois de bambara .
" Havereno aminay ré Tompoko ny lohasahanay azafady, " S ' il vous plaît , rendez nous , Messieurs au pouvoir, notre vallée des pintades."
C'est la raison de présence des paysans à la grève sur la place du 13 Mai .
Ils étaient une dizaine là-bas sur la place des révoltés... mais ils réprésenteront dorénavant , devant l'Histoire convulsive de l'instant et pour le futur trés proche , la voix de plus de 8 000 000 petits paysans, cultivateurs , bouviers, pêcheurs etc... que les politiques semblent ignorer.
La terre a enfin crié sa révolte. Enfin .

Bonne journée

Commentaire : Dessin sur Pousse de Ralay dit R . La paysanne va ramener au poulailler les canards barbotant dans la mare ( Handraoka Gana milalao rano IKALA kely )